Abraham

Abraham

 

Abraham : Informations de base 

Nom  et signification   Abram : Le père est grand 
Abraham : père d’une multitude selon Gn 17,5
Famille Père : Terah
Femme : Saraï/Sara et Qetourah 
Concubines : Agar 
enfants : Ismaël (avec Agar), Isaac (avec Sara) et Zimrân, Yoqshân, Medân, Madiân, Yishbaq et Shuah (avec Qetourah)  
Neveu : Lot 
Lieux associés Originaire de Ur en Mésopotamie (Irak actuel)     
il s’établit à Hébron au pays de Canaan
Repères biographiques Traditionnellement, on le situe vers 1850 av. Jésus Christ. Une époque où l’écriture n’était pas encore inventée?
-    À 75 ans départ vers Canaan
-    À 86 ans il a son premier fils Ismaël avec Hagar sa servante
-    À 100 ans, il a fils Isaac avec sa femme Sarah qui a elle-même 90 ans!
-    À 175 ans il meurt et est enterré à Makpéla
Récits importants
Genèse 11,26-25,11 
-    Promesse de Dieu et voyage (Gn 12)
-    Alliance avec Dieu (Gn 15)
-    Naissance d’Ismaël (Gn 16)
-    Origine de la circoncision (Gn 17)
-    Intercession pour Sodome (Gn 18)
-    Naissance d’Isaac (Gn 21)
-    Sacrifice évité de son enfant (Gn 22)
-    Mariage à Qetoura et mort (Gn 25)
Postérité  Père du monothéisme, père de tous les croyants (juifs, chrétiens et musulmans).
La tradition juive voit en lui l’incarnation de l’hospitalité.
Les musulmans l’appellent Khalil Allah « l’ami de Dieu ».
La tradition chrétienne voit dans le repas et la bénédiction qu’il reçoit de Melkisédeq une préfiguration de l’eucharistie.

Papa, raconte-nous une histoire! 

Tous les enfants aiment les histoires. Lorsqu’ils les écoutent, ils partent à l’aventure dans un monde qui ressemble au nôtre, mais où certaines limites n’existent pas. Quand je lis les grands récits du livre de la Genèse comme ceux décrivant Abraham, j’aime penser que je suis autour d’un feu quelques centaines d’années avant la naissance de Jésus, au moment où on les transmettait par tradition orale avant qu’il ne soit mis par écrit. Sans télévision ou internet, l’activité la plus intéressante était sans doute d’écouter un ancien membre du clan raconter les histoires qui unissent le peuple. 

Ces grands récits sont loin d’être des reportages journalistiques. Les personnages ont des espérances de vie extrêmement longues, ils communiquent directement avec Dieu ou avec ces anges, il y a souvent des actes merveilleux, etc. Il faut savoir que les récits concernant Abraham sont situés vers 1850 av. J.C. et que les spécialistes affirment qu’ils ont été mis par écrit plus de 1000 ans après cette époque. Essayer de prouver qu’il y a une exactitude historique aux détails des récits concernant Abraham est donc impossible. 

Par contre, on ne peut pas dire que ces textes sont de pures inventions. On raconte ces récits parce qu’ils touchent la vie de ceux qui les écoutent. Les Juifs qui parlent d’Abraham le font puisque pour eux, il est le prototype de tous leurs ancêtres. Ils se reconnaissent en lui et construisent leur identité propre en parlant d’Abraham. Par exemple, lorsqu’ils parlent de la relation privilégiée du Dieu unique avec Abraham, ils forgent leur propre relation à ce Dieu. Le récit d’Abraham qui fait alliance avec Dieu exprime l’origine de l’alliance à Dieu de ceux qui transmettent ce récit. Ils parlent d’eux-mêmes, de leur situation, de leur rapport à Dieu en décrivant celui de leur ancêtre commun : Abraham. 

Puis, deux millénaires plus tard, lorsque nous lisons ces textes, c’est à notre tour de s’interroger sur l’origine de notre foi et de notre relation à Dieu. J’aime lire ces grands récits fondateurs puisqu’ils me permettent de transcender le temps et d’aller m’asseoir auprès des grands sages d’une autre époque pour réfléchir avec eux.

Abraham et le dialogue interreligieux

Abraham est présenté à juste titre comme le père de tous les croyants. En plus des juifs et des chrétiens, les musulmans aussi le présentent comme un prophète important. Toutefois, son histoire est racontée dans le Coran d’une façon un peu différente. En arabe, son nom est Ibrahim. Il est aussi appelé Khalil Allah, ce qui veut dire : « l’ami de Dieu ». Pour eux, il est le premier « musulman », c’est-à-dire : le premier à vouloir faire la volonté de Dieu de façon radicale.

Les musulmans se disent descendants d’Ismaël alors que les juifs affirment avoir Isaac comme ancêtre. Ces traditions affirment donc que Juifs et musulmans auraient le même ancêtre : Abraham, le père des croyants. Pourtant, même s’ils ont un ancêtre commun, les Juifs et les musulmans se trouvent souvent en conflit. C’est à souhaiter que le personnage d’Abraham puisse inspirer le dialogue interreligieux et permettre une meilleure compréhension de ceux qui sont de lointains parents.

Abraham en chanson

Le personnage d’Abraham a inspiré quelques chansons intéressantes. Je vous invite à revisiter deux de celles-ci. La première nous provient de Félix Leclerc et s’intitule « Comme Abraham »[1] . Les paroles pointent vers l’aspiration de vivre comme les saints et les grands personnages de jadis malgré les difficultés de la vie quotidienne. « J'admire celui qui met le cap sur l'infini. J'envie celui qui met le cap sur l'infini. Quelqu'fois aussi, je m'embarquerais avec lui. » Un peu comme Abraham, Félix est devenu le père des chansonniers québécois.  

L’autre chanson est beaucoup plus bouleversante. Il s’agit de « Abraham Papa »[2]  composée par Sylvain Lelièvre qui reprend l’histoire du sacrifice d’Issac par son père Abraham. Elle critique certaines images que nous avons de Dieu et remet en question l’héritage laissé par la chrétienté. L’injustice et l’absurdité de la souffrance d’un innocent y sont décriées avec insistance. Il faut écouter cette chanson provocante qui permet une réflexion sur l’image que nous avons de Dieu. 

Sébastien Doane, bibliste

Première parution : Revue Notre-Dame du Cap

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[1] Tiré de l’album Le P’tit Bonheur, réédité en 2002 par Universal Music Division Mercury.
[2] Tiré de l’album Versant jazz (2002), enregistré au Lion d’Or en novembre 2001, Sélect/GSI Musique, NAC-9408.